Les crèches dans les mairies : un cas pratique

Modifié par Clemni

L'article 28 du titre V de la loi de 1905 énonce l'interdiction d'élever ou d'apposer des signes ou emblèmes religieux sur les bâtiments publics. Or, en 2012, la mairie de Melun a installé une crèche dans ses locaux, qui a fait l'objet de contestations dont l'issue a été un jugement rendu par le Conseil d'État en 2016 confirmant l'illégalité de l'installation.

Le Conseil d'État a rendu sa décision

« L’installation de cette crèche dans l’enceinte de ce bâtiment public, siège d’une collectivité publique, ne résultait d’aucun usage local et n’était accompagnée d’aucun autre élément marquant son inscription dans un environnement culturel, artistique ou festif. Il s’ensuit que le fait pour le maire de Melun d’avoir procédé à cette installation dans l’enceinte d’un bâtiment public, siège d’une collectivité publique, en l’absence de circonstances particulières permettant de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif, a méconnu l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 et les exigences attachées au principe de neutralité des personnes publiques. »

Arrêt C.E. 9 novembre 2016, Commune de Melun, n° 395122.

Extraits des motivations du Conseil d'État

« Aux termes des trois premières phrases du premier alinéa de l'article 1er de la Constitution : "La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances."

La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État crée, pour les personnes publiques, des obligations, en leur imposant notamment, d'une part, d'assurer la liberté de conscience et de garantir le libre exercice des cultes, d'autre part, de veiller à la neutralité des agents publics et des services publics à l'égard des cultes, en particulier en n'en reconnaissant ni n'en subventionnant aucun. Ainsi, aux termes de l'article 1er de cette loi : "La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public" et, aux termes de son article 2 : "La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte."

Pour la mise en œuvre de ces principes, l'article 28 de cette même loi précise que : "Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires ainsi que des musées ou expositions". Ces dernières dispositions, qui ont pour objet d'assurer la neutralité des personnes publiques à l'égard des cultes, s'opposent à l'installation par celles-ci, dans un emplacement public, d'un signe ou emblème manifestant la reconnaissance d'un culte ou marquant une préférence religieuse. Elles ménagent néanmoins des exceptions à cette interdiction. Ainsi, est notamment réservée la possibilité pour les personnes publiques d'apposer de tels signes ou emblèmes dans un emplacement public à titre d'exposition.

En outre, en prévoyant que l'interdiction qu'il a édictée ne s'appliquerait que pour l'avenir, le législateur a préservé les signes et emblèmes religieux existants à la date de l'entrée en vigueur de la loi. [...]

11. Il ressort des pièces du dossier que, pendant la période des fêtes de la fin de l'année 2012, le maire de Melun a installé une crèche de Noël dans une alcôve située sous le porche reliant la cour d'honneur au jardin de l'hôtel de ville de Melun et permettant l'accès des usagers aux services publics municipaux. L'installation de cette crèche dans l'enceinte de ce bâtiment public, siège d'une collectivité publique, ne résultait d'aucun usage local et n'était accompagnée d'aucun autre élément marquant son inscription dans un environnement culturel, artistique ou festif. Il s'ensuit que le fait pour le maire de Melun d'avoir procédé à cette installation dans l'enceinte d'un bâtiment public, siège d'une collectivité publique, en l'absence de circonstances particulières permettant de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif, a méconnu l'article 28 de la loi du 9 décembre 1905 et les exigences attachées au principe de neutralité des personnes publiques. »

Extraits des motivations de la décision du Conseil d'État n° 395122, Commune de Melun, 9 novembre 2016.

Questions

  • Quel fait a conduit le Conseil d'État à se prononcer sur l'installation d'une crèche à l'occasion de Noël dans une mairie ?
  • Quel(s) article(s) de la loi de la Constitution et de la loi de 1905 peuvent être invoqués pour motiver la décision du Conseil d'État ?
  • Quel est le principal motif retenu par le Conseil d'État pour estimer illégale l'installation d'une crèche dans un bâtiment public ?

À lire dans la presse régionale : https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/seine-et-marne/creche-noel-mairie-melun-est-illegale-conseil-etat-1126461.html

Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr
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